Parazyte : éloge de la symbiose

AUTEURS : Thomas Lebrun, Albert Royer

Qu’arriverait-il, dans un monde semblable au nôtre, si, en une nuit, les forces dominantes étaient bouleversées : si les humains n’étaient plus les seuls êtres doués d’intelligence et devaient se confronter à une forme de vie supérieure, dépourvue de morale et de compassion ?

Parasyte The Maxim est une série d’animation japonaise de de 24 épisodes, diffusée de 2014 à 2015. Elle est adaptée du manga du même nom, sorti entre 1988 et 1994. L’histoire se déroule dans un monde contemporain, similaire au nôtre. L’année n’étant pas précisée, on peut s’imaginer assez facilement que l’histoire se déroule à l’époque du manga. Les voitures, l’architecture des villes et le mode de vie à l’université nous immergent complètement dans le japon des années 80. Nous assistons aux répercussions de cette invasion, ce qui amène le public à se poser la question suivante : comment réagir à une forme de vie étrangère, faut-il tuer le monstre ou apprendre à cohabiter avec lui ?

Humains et parasites

Le réseau des personnages fait apparaître le partage des rôles entre humains et parasites, Nous retrouvons en son centre deux personnages majeurs de l’intrigue: Shinichi, un jeune humain, et Migi, un parasite ayant infecté son corps.Nous suivrons donc ce jeune étudiant, Shinichi Izumi, après que ce dernier ait vu sa main droite infestée par Migi durant la nuit. Assez vite, notre jeune héros découvre que le parasite voulait viser son cerveau et s’est retrouvé coincé dans le bras.

Dans la mesure où le parasite n’a pas réussi à prendre le contrôle complet de son hôte, nous assistons à la naissance d’une nouvelle forme de vie, marquée par la symbiose entre l’humain et le parasite. Mais Shinichi n’est pas le seul à avoir été infecté: nous le suivons dans sa tentative de poursuivre une vie universitaire plus ou moins normale, au milieu d’humains, mais aussi de dangereux parasites anthropophages. De ce fait, il n’est pas étonnant de retrouver Migi et Shinichi au centre de ce réseau. En tant que duo principal, ils sont en contact avec tous les personnages de l’œuvre, qu’ils soient parasites ou humains.

On séparera cependant ces deux catégories puisque les interactions entre personnages ne seront pas les mêmes. Shinichi, dans un souci d’anonymat, ne révèlera à presque aucun humain l’existence de Migi. De cette manière, Migi n’a que très peu d’interactions avec les humains, là ou elle sera surtout active dans tous les combats et les échanges avec des parasites. Cette répartition des rôles se reflète sur le graphe qui nous montre deux ensembles distincts: les humains et les parasites, avec Migi et Shinichi en représentant majeur de chaque espèce.

Le conflit des espèces

Shinichi ne cesse de se poser des questions, se demandant qui il est, et ce qu’il devient, de par son manque d’émotions face à des événements tristes. Quel point de vue adopter: les humains sont-ils des hypocrites comme le soulignent les parasites ou bien les parasites sont-ils tout simplement des monstres froids?

On voit à certains moment dans l’œuvre des contradictions dans le raisonnement humain: d’un côté ils considèrent les parasites comme des monstres car ceux-ci les chassent et les mangent, mais d’un autre côté, les hommes ont un comportement similaire à celui des parasites, car ils chassent et mangent également les autres espèces! Ainsi,les humains voient les parasites comme des monstres dévoreurs d’hommes, quand les parasites voient les humains comme le fléau de la Terre. De ce fait, ils ne s’attaquent qu’à eux et seraient apparus sur Terre pour mettre fin au règne humain et sauver la planète.

L’arrivée de cette nouvelle espèce fait ressortir un des anciens instincts de l’homme: l’humanité réapprend à ses dépends ce qu’est «l’instinct de survie», avec l’arrivée sur Terre d’une espèce qui ne semble, dans un premier temps, n’avoir pour but que de l’éradiquer. L’homme a changé de place dans la hiérarchie des espèces: il n’est plus au sommet de la chaîne alimentaire. On voit au fil des épisodes la peur s’engouffrer dans le cœur des hommes qui finissent, au fil du récit, par réapprendre à craindre l’autre.

L’œuvre fait ressortir une des caractéristiques humaines les plus flagrantes: la peur de l’inconnue. Au lieu de chercher à communiquer avec l’autre espèce douée d’intelligence, les humains finissent pas les chasser, les exterminer, aux détriments d’une possible collaboration qui aurait pu être bénéfique aux deux espèces, comme le montre quelques duos pendant le déroulement de l’histoire. De plus, les hommes ne font pas la distinction entre cette nouvelle espèce et ses alliés humains. En ce sens, la critique que portent les parasites paraît fondée: les humains sont bien hypocrites.

Ainsi, dans un premier temps, l’incapacité à différencier un parasite d’un humain sème la panique parmi les policiers et le gouvernement, qui essaient de cacher au grand public l’apparition de la nouvelle espèce. L’aspect technique est abordé principalement par cette activité policière et sa réponse chez les parasites. La composante politique est surtout représentée par le maire Takeshi Hirokawa et certains leaders comme Hirama ou Yamagishi. Ces personnages amènent dans l’histoire toutes les questions sur la place de la peur en politique et plus généralement les réactions humaines face à l’inconnu. Cependant, grâce à la science, Oda, un agent de la police scientifique découvre une technologie permettant de différencier les parasites des êtres humains.

La science : une contre valeur ?

On voit sur le graphe que, même si à première vue, la technique et la politique dominent ce graphe, ils se plient tous les deux à la science. Beaucoup de personnages principaux partagent, en effet, une activité scientifique, avant même d’être des leaders.

La scientifique qui joue le rôle le plus important dans l’histoire est sans aucun doute Reiko Tamura. Elle appartient elle-même à l’espèce parasite et s’efforce jusqu’à sa mort de comprendre les humains et leur mode de fonctionnement pour mieux s’intégrer parmi eux. Afin de comprendre le monde humain, elle ira même jusqu’à enfanter et créer des mutants. Elle pourrait s’apparenter, de ce point de vue, à une figure de savant-fou, qui réalise des manipulations sur le vivant.

Néanmoins, la représentation de la science conserve toujours une dimension positive. Le personnage de Reiko représente de manière emblématique la volonté d’une cohabitation et met en lumière les effets bénéfiques qu’une entraide inter-espèce pourrait apporter. Nous pouvons aussi penser aux cas de Migi et Jaw, deux autres parasites qui ont su s’adapter et même obtenir une certaine «part d’humanité», même s’ils restent avant tout préoccupés par leur survie. Cette cohabitation, voire même hybridation entre espèces, apparaît donc comme partie intégrante du futur de la Terre, des parasites s’étant déjà «sédentarisés».

Ainsi, la science apporte la seule bonne réponse aux problèmes posés par l’œuvre: pour vivre avec une autre espèce intelligente, la compréhension de l’autre est essentielle et préférable au conflit et à la traque qui ne mènent nulle part.

Coopérer et s'hybrider

Ainsi, la compréhension de l’autre est essentielle pour vivre ensemble, comme le prouve Reiko Tamura qui parviendra à convaincre que les parasites, malgré leurs antécédents meurtriers, ont la capacité de s’assimiler aux humains et maîtriser leurs pulsions, au profit d’une coopération mutuellement bénéfique. Cependant, l’œuvre indique également une autre option, plus radicale, pour vivre ensemble: faire des hybrides, des êtres mixtes ou bien des chimères, aller au-delà d’une simple cohabitation et créer une espèce d’un nouveau genre, plus forte et plus proche des deux espèces initiales.

L’œuvre nous l’indique dès le milieu du récit en mettant en scène la proximité entre Jaw et Uda Mamoru, que leur cohabitation pousse à mieux se comprendre. De plus, elle nous montre un héros, qui représente lui-même quelque chose de plus grand qu’une simple collaboration ou compréhension de l’autre espèce, puisqu’il est déjà une sorte d’hybride, à la fois parasite et humain. Ainsi, il comprend Migi mieux que personne. Et cette compréhension est réciproque : ces deux êtres ont en quelque sorte fusionné. L’oeuvre présente également une autre hybridation, avec un enfant né de deux parasites contrôlant des corps humains.